Les structures sonores de Philippe Destrem

Cinq questions à Philippe Destrem, musicien, enseignant, spécialiste de la musique traditionnelle du Limousin, et fabricant d’instruments.

N.M.L. : Présentez-nous votre démarche personnelle autour de la fabrication d’instruments ou de “machines sonores”…
Philippe Destrem : En tant que fabricant d’instruments non répertoriés et de structures sonores, ma recherche sur les matériaux est très ouverte. Je teste et utilise toutes sortes d’éléments que m’offrent la nature, l’industrie, le recyclage, etc. Ce sont mes exigences sonores de musicien qui vont déterminer mes choix. Par ailleurs, n’ayant aucun souci de rentabilité commerciale, (mes instruments ne sont jamais vendus), je soigne l’esthétique et le confort de jeu.

N.M.L : Quels sont les liens entre votre pratique de musicien traditionnel et votre fabrication ?
Ph.D. : Aujourd’hui mon intérêt se porte autant sur les timbres et leurs mariages que sur le répertoire et les mélodies. Aussi, les musiques traditionnelles me comblent par leur richesse et leur variété.

N.M.L : A quels emplois, à quelles musiques sont rattachés vos instruments ?
Ph. D. : Multiples ! Ma musique et ma fabrication se nourrissent de rencontres avec des milieux artistiques différents du mien.
Grâce à ces nombreux contacts, j’ai pu développer un instrumentarium très varié : des structures sonores fonctionnant avec le vent pour un spectacle théâtral, des instruments d’accompagnement à cordes frappées, des bourdons guide-chant pour des spectacles de musique ancienne, des percussions à eau, des flûtes harmoniques, des trompes, des boîtes à rythme mécaniques pour des spectacles de musique métissée et nouvelle, un orgue à bouche, des bourdons rythmiques, des instruments mélodiques à anche simple pour des spectacles de musique traditionnelle.

N.M.L : Lors de la création « Dans la Peau » à St-J unien en juin 1997 (cf NML n° 48 et 49), vous aviez mené une recherche à partir des machines et outils des mégisserie et ganteries. Quelle a été votre démarche ?
_ Ph.D. : Il nous paraissait important de partir d’images, de sons, de gestuelles, appartenant au patrimoine industriel et humain.
Comprendre les collectages effectués en amont, les intégrer, et enfin les restituer, en fonction de nos sensibilités et des impératifs du spectacle vivant musical. C’est cette contrainte de sujet qui a toujours donné un sens et un cadre à mon travail, et je pense ne pouvoir fonctionner que de cette manière.

N.M.L Dans vos réalisations, vous avez une réelle démarche plastique et esthétique, quel rôle a cette dimension dans votre création ?

Ph.D. : Étant plus attiré par le spectacle vivant que par l’enregistrement, mes exigences se portent autant sur la qualité des timbres et la fiabilité de mes instruments que sur l’harmonie des formes et les images qu’ils vont évoquer.

Propos recueillis par les Nouvelles Musicales en Limousin, n°53, mars-avril 1998.